Deux jours de repos à Khorog et c’est reparti direction le corridor du Wakhan, qui est un peu la version longue du Pamir. Cette variante de la M41 continue de longer l’Afghanistan sur 200km environ, avant de rejoindre la route principale.
Le jeudi 6 août, accompagnés de nos deux acolytes à vélo couché, on se dirige vers Ishkashim où le fameux marché afghan est fermé depuis plus d’un mois, pour cause de talibans non loin de là selon les locaux. Heureusement les vergers ne font pas parti de leurs cibles et on s’installe donc tranquillement à l’ombre d’abricotiers. La tentation est trop grande, ce soir c’est pizza au feu de bois et surtout confection de confiture maison pour les prochains jours.
On en oublierait presque que la région est hostile, que le danger est omniprésent. Au cours de la nuit une bête féroce nous rend visite. Plus de peur que de mal. La leçon est retenue, les sacs poubelles resteront loin des tentes désormais.
Bien que la route ne grimpe pas vraiment dans le corridor du Wakhan, les sommets autours de nous sont eux de plus en plus haut. De l’autre coté de la rivière Panj, on aperçoit par exemple l’Hindu Kush, chaine de hautes montagnes enneigées, partagée entre Pakistan et Afghanistan. Pour l’instant nous on profite encore de la chaleur, une bonne vingtaine de degrés à 2500m d’altitude. Pas longtemps par contre, car le dimanche 9 août, on arrive à Langar. Langar c’est le dernier village avant plusieurs jours. C’est le dernier village où on peut trouver à manger : pâtes, lait concentré, biscuits en vrac qui même sans DLC ne font pas illusions, mais qui laissent au moins planer le doute quelques secondes contrairement aux boites de conserve de lait aussi âgées que nous. Mais Langar c’est surtout le dernier village avant de monter très haut, avant le sable et la montagne, la vraie.
Le 10 août au soir, après avoir pédalé et poussé toute la journée on campe pour la dernière fois face à l’Afghanistan. La route remonte plein nord maintenant. Le lendemain on atteint le deuxième col depuis Dushanbe, un peu plus haut que 4300 mètres. Le souffle est court mais aucun signe de mal des montagnes pour aucun d’entre nous. Le paysage est indescriptible, les photos fades comparées à la réalité. Il faut se forcer pour avancer mais parfois c’est impossible. Ce lac salé, par exemple, juché à 4000m nous subjugue. On y reste, on y campe même si un aller retour de 15km est nécessaire pour ramener de l’eau.
Le 12 août on retrouve l’asphalte et la Pamir Highway. C’est aussi le jour où notre coté maso s’exprime. On quitte l’asphalte à peine dessus. Désolé pour les puristes, pas de fouet ou de masque, juste de la tôle ondulée, une spécialité du coin. Ça remue, ça vibre, beaucoup trop certes, mais le village de bout du monde, Bulunkul, et ses lacs aux milles couleurs valent le coup d’œil. On y croise même Claude Martheler, qui nous avait invité à boire un café il y a maintenant neuf mois, à Genève ! Il nous parle d’une petite source d’eau chaude non répertoriée. « Prenez à gauche quand une trace de 4*4 tourne à 90° ». Rêveur d’une soirée à contempler les étoiles dans un bain chaud on repart motivés. Plusieurs heures plus tard, après s’être un peu perdu, trompés de route, crus sur la lune, cassé le guidon du vélo de Nicolas et avoir emprunté trop de traces tournant à 90°, on abandonne à la nuit tombée. L’endroit n’est pas dégueu, de toute façon ça ne semble pas exister par ici, mais point d’eau chaude.
Le lendemain après une réparation du guidon à faire rougir MacGyver, on découvre la source à à peine trois kilomètres. Après l’effort le réconfort. Un déménagement, un jour de repos, de la grande cuisine, des pancakes au caramel fondu pour le petit déjeuner, des lessives à l’eau tiède, deux soirées à contempler les étoiles filantes dans de l’eau presque trop chaude, tout ça à 4000 mètres.
Tout ces excès se payeront. Ben c’est fait dès le lendemain. La ville d’Alichur, synonyme de ravitaillement après une semaine, n’est pas très loin mais la route est difficile. Nicolas roule en équilibre instable et enchaine les chutes – bon ok Richard à part la coupe tu restes le meilleur -. Rejoindre la M41 pour de bon nous prend une grande partie de la journée. Contre toute attente, on y trouve l’homme à tout faire. A l’aide d’un jerricane branché à un moteur transformé en groupe électrogène pour alimenter la perceuse électrique, il fait des miracles et répare le vélo de Nicolas. Pour les remercier on reste dans leur homestay pour la soirée. En échange d’un peu d’argent, on vous offre le gite et le couvert, à base de riz, lait et thé. En se baladant dans le village on se fait également inviter à boire le thé par une famille. Celui-ci est servi avec du pain et toutes les déclinaisons de produits laitiers de yak, du beurre à la crème, en passant par le yaourt. Le ventre plein on s’excuse de devoir retourner dans la homestay car c’est déjà l’heure du diner.
Cette partie du Tadjikistan est habitée par des Kirghizes. Ce qui explique les chapeaux kirghizes, l’heure kirghize et la langue kirghize, proche du turc. On est également sur le plateau du Pamir. De longues lignes droites, des plaines entourées de montagnes toutes plus hautes que le Mont Blanc, quelques yourtes, très peu de voitures, beaucoup de cyclistes, encore plus de marmottes et pas mal de vent. Mais qu’importe, le macadam est là et ça roule facilement. Trop peut être car à peine une journée et on se laisse tenter par un observatoire abandonné à une trentaine de kilomètres de la M41. Décors surréalistes encore. C’est de la surenchère. La vue depuis l’observatoire n’est stoppée que par des sommets lointains. D’ailleurs on voit de nos propres yeux et pour la première fois la Chine et ses sommets proches de 8000m, à une centaine de kilomètres à vol d’oiseaux.
Après cette nuit à 4300 mètres, la plus haute du voyage, on retourne sur la route principale, bien décidé à y rester un peu. On enchaine les journées sans forcer, on pédale un peu, on s’arrête beaucoup. Les appareils photos chauffent. Les cuisses aussi à chaque nouveau col. On passe par le village de Murghab, coupé du réseau électrique depuis plus d’un mois, mais qui n’empêche pas son bazar quotidien fait uniquement de container d’avoir lieu.
Sans vraiment s’en apercevoir nous voilà au plus haut le 22 août. Le col Ak-Baital culmine à 4655 mètres. Mais les montagnes alentours toutes plus démesurées rendent la performance anecdotique. Les nuits sont de plus en plus fraiches. Quelques flocons nous accompagnent souvent le matin, ou parfois même un peu de grêle.
Le 22 août on atteint le lac de Karakul et son village du même nom. Comme d’habitude on ravitaille en biscuits mous, lait concentré périmé, riz et quelques pommes de terre qui font la gueule. Ça fait un mois que ce régime nous maintient en forme. Mais la fatigue se fait sentir. On a hâte de se reposer un peu plus bas. Malgré cela on prend notre temps. On passe la frontière Tadjik et son dernier col à plus de 4000 mètre le 25 août. 12 kilomètres de no mans land aux paysages impressionnants comme toujours, et on entre au Kirghizistan.
On laisse disparaître les hautes montagnes derrière nous et le pic Lenine pour plonger vers la ville de Osh. Mais tout d’abord Sary-Tash et son carrefour. Si on prend à droite on est en Chine dans 70 kilomètres. Mais ce sera pour plus tard, d’ici un mois et demi. Pour l’instant on prend tout droit, un petit col et puis ça descend pendant 150 kilomètres. On aperçoit beaucoup de yourtes, de chevaux, de yaks. Le 27 août, un cavalier vient nous chercher au réveil et nous invite à prendre le petit déjeuner avec sa famille. On goute le fameux « kumiz» lait de jument fermenté. Le fermenté résume suffisamment le gout. Mais la fierté dans les yeux de la famille nous interdit de recracher. Tant pis, on boit tout, puis on se jette sur le pain et le thé pour faire passer. Le midi, même chose, une famille nous invite. Thé, gâteaux, pain, kumiz.
Après plusieurs semaines loin de tout, on est ravi d‘échanger de nouveau avec les habitants, pas avec la circulation. Le soir on nous prête une yourte désaffectée pour rester au sec car la pluie refait son apparition en même temps qu’on descend en altitude.
Le lendemain, pensant que la yourte ne suffisait pas, la famille nous invite pour le petit déjeuner dans leur maison. Pas de kumiz on est enchanté. Un peu moins à la vue des rognons bien chaud dans nos assiettes.
Le samedi 29 août on arrive enfin à Osh, deuxième ville du Kirghizistan. Le programme est simple. Admirer la fête de l’indépendance du pays sous le regard perplexe de Lénine, se reposer et préparer la suite. Mais Osh est aussi synonyme de séparation. Depuis l’Arménie il y a 4 mois, on roule ensemble ou à quelques jours d’écart avec Gökben et Nicolas. Bientôt ils repartiront vers la Chine. Pour nous, c’est le moment de faire une pause. Après 10 mois à vélo on a trouvé une bonne excuse. La sœur de Charlotte se marie et on ne peut pas louper ça. Un mariage au Kirghizistan ne les tente pas donc on s’envole pour retourner en Alsace. Quelques semaines de vacances, un peu de fromage et de vin puis on revient à Osh début octobre enfourcher nos vélos qui nous y attendent. On ne veut pas vous dévoiler la suite mais il sera question de vélo, de Chine et bien plus.
Galerie photos (Si vous en voulez plus voir l’onglet Photos)
Première? J’y crois pas!!!!! 😀
Le tant attendu article… 😉
Petite réclamation tout de même: Les pizzas -> Check. (Merci Charlotte)
Les pancakes au caramel ??
Une fois de plus je crois que j’ai pas capté la subtilité de l’article -_-
Les photos sont superbes!!!
Et oui, la toute première …. Incroyable !
Pour les pancakes au caramel il faut voir avec Eric … On ne repart “que” vendredi (bordel déjà ???!!!)
Pas de subtilité pour cet article, jusque que toutes nos photos, à cause de ces superbes paysages” sont au “format paysage” (horizontaux, à l’inverse du “format portait” qui lui est vertical).
Alors, tu as bien coché la petite case ?
Non pas coché la petite case, je garde le suspense jusqu’au bout 😀
Et bien dites donc quelles merveilles !
Vous nous faites découvrir des endroits superbes et des gens sympa c’est génial .
Vous avez bien attaché les vélos pour être certain de les retrouver
Et oui vous avez retrouver votre Alsace pour cet heureux événement , vous n’avez pas été malade , quelle épreuve ! dur dur pour vous !!
Nous avons bien récupéré les vélos, laissés “en pension” chez Patrick, un suisse qui organise des voyages à moto en Asie centrale (http://muztoo.ch).
Nous ne sommes de retour à Osh que depuis quelques jours mais notre passage en France nous paraît déjà tellement loin 🙁
Bientôt nous re-enfourchons nos montures pour de nouvelles aventures au pays des pandas 🙂
Super
Vous voici connecté à nouveau avec la nature , Eric joue au mécanicien et vous avez encore quelques traces de notre vie mtérialiste ! dont vous arrivez à vous passer !
Tu parles de Patrick qui organise des virées en moto en Asie. Ce vendredi il y a un organisme qui présente à Metz des sorties en Amérique et d’aires continents; créé par un alsacien, l’ancien concesionnaire Harley Davidson de Strasbourg au début de l’arrivée d’Harley en France car des clients “fortunés” lui ont demandé d’organiser des voyages en Amérique , c’est devenu son activité qu’il a développé et recédé pour aujourd’hui participer à la découverte d’autres continents toujours en Harley .
A bientôt et bises à vous deux
Philippe et Corinne
Tout d’abord bonne reprise de route à mes 2 pigeons voyageurs préférés !
J’ai été ravie de vous avoir vus !
Grâce à vous je profite d’une exploration du monde extraordinaire !
Take care ! Plein de gros bisous
On n’est pas (que) des pigeons !!!!
Elle est bien loin cette délicieuse tarte flambée et ce bon petit rouge local 😉
Bientôt la chine, et d’autres spécialités locales …. !
Des bisous !!!
Les poivrons, les courgettes et les aubergines sèchent sur le fil à linge. Dans mon cabas j’ai le gingembre, la cannelle, le clous de girofle, la muscade, le poivre et le sel. Grâce à votre “Taste of Sun & Fire” on voyage un peu aussi, nous. Alors après le Uzbek Pilavi, les Kabak Mihsisi (me manque la petite barre sous le 1er “s”) et les Kazan Kebabi, je me tente le Kumiz !!! Bon faut encore que je choppe une jument…pas si fastoche…mais je reste confiante !
Continuez votre aventure pour que nous aillions de magnifiques photos, de belles histoires humaines et que l’on puisse voir vos yeux briller et vos sourires s’élargirent quand vous nous raconterez vos souvenirs.
(je sais s’est très égoïste, 😈).
On vous aime 😘😘😘 (on vous le dit trop souvent hein ?)
Les Lucchitos
Les yeux sèchent après avoir beaucoup pleuré la dernière semaine. Dans nos sacoches encore un toblerone et quelques (kilos de) snickers. Grâce à votre kit leathermann on a déjà pu bricoler un peu sur les vélos. Eric finit de nous changer les pédales et d’enfiler ma guidoline “orange pétant”, pendant ce temps j’essaie de tout faire rentrer dans les sacoches.
“On va s’alléger” qu’il disait … “C’est pas sûr” je nuance.
On verra bien sur les prochaines photos … Suspense ! Vivement les pandas, et la grande muraille ! Mais d’abord, le desert ( avec un seul s hein ?!)
Des bisous . Parce qu’on vous aime aussi !
Salut tous les deux,
on ne vous avais pas écrit depuis que vous êtes partis, mais on regarde avec attention chacune de vos aventures. Les dernières photos sont magnifiques, les paysages ont presque aussi jolis qu’à Brest…
On a hâte de découvrir les pandas…
Ah au fait Eric, j’ai l’impression que tu profites bien de la nourriture à chaque étape. Fais attention, déjà que tu n’étais pas bien sportif avant, mais là tu vas vraiment rentrer “gros”…
Eclatez-vous bien
Bisous
Cédric, Amandine, Arthur et Malo
C’est vrai que les paysages rivalisent difficilement avec la Bretagne …. Il faudra repasser par chez vous avec nos vélos quand on rentre pour rencontrer Malo et voir des vrais paysages, des amis et … des crêpes ? 😉
On se réjouit de voir des pandas aussi ! Si on a de la chance on devrait même voir les bébés de cette année !
Je surveille la ligne d’Eric… le problème c’est qu’il surveille aussi la mienne … et c’est difficile de ne pas se jeter sur la nourriture chinoise, pleine de saveurs et d’épices quand en plus elle est bon marché ! Les abdos ont disparus depuis longtemps mais les cuisses sont bien fermes.
Des bisous !
Coucou vous deux du 11 …
J’ai hâte d’avoir de vos nouvelles et j’espère que tout ce passe bien pour vous.
Je pense bien à vous et vous envoie des bisous.
Monique
Tout se passe super bien pour nous ! La Chine nous plaît toujours autant ! Et nous allons bientôt découvrir Hong Kong le temps d’une semaine et d’une relance de visa pour notre 2eme entrée en Chine !!
Les premiers flocons de la rue des bornes nous manquent, et le vin chaud du marché de Noël aussi mais on est super excités d’être en Asie !
Des bisous !
quelqu’un sait-il si le marché afghan est rouvert, j’y étais en août 2015: fermé!